La canicule et les violents incendies qui se sont déclarés fin juillet dans sept régions autour de Moscou prennent des proportions dramatiques. Alors que les décès se multiplient, que la capitale est envahie par une fumée épaisse et que les autorités russes tentent de réagir pour éviter une catastrophe sanitaire, de nombreuses questions demeurent.

Pourquoi les incendies persistent-ils ?
La canicule, qui sévit en Russie depuis début juillet, est en partie à l'origine des gigantesques incendies. Le pays est écrasé par une chaleur sans précédent, "la pire en 1.000 ans" selon le directeur des services météorologiques russes. Après un record établi à 38,2 degrés à Moscou le 29 juillet, c'est l'ancienne capitale impériale Saint-Pétersbourg qui enregistre un record absolu de température, samedi 7 août, avec 37,1 degrés. Mais la météo ne justifie pas tout. Les feux se sont déclenchés dans des régions fournies en tourbières, des marais qui ont été largement asséchés à l'époque soviétique. Or ces types de feux sont très difficiles à éteindre : la tourbe se consume lentement sur plusieurs mètres de profondeur et peut même continuer à brûler sous la neige !

Enfin, le mauvais entretien des forêts et surtout la réforme du code forestier, décidée en 2007 par Poutine, sont mis en cause pour expliquer l'ampleur des feux. La protection des forêts revient aux régions, avec des problèmes de moyens et de coordination lorsqu'un feu passe d'une région à l'autre.


Quels sont les moyens déployés ?
Quelque 7.000 militaires russes luttent contre les incendies aux côtés des dizaines de milliers de pompiers. Dépassée par la tournure des événements, Moscou a aussi fait appel à des volontaires.

Quels pays aident la Russie à combattre le feu ?
Face à l'ampleur des incendies, la France a dépêché 120 hommes, 37 véhicules, 15 motopompes et un avion gros-porteur bombardier d'eau. Trois experts français de lutte anti-incendie travaillent aussi conjointement avec les autorités russes. Enfin, 30.000 masques antifumée ont été envoyés en renfort pour aider les Moscovites à supporter les épaisses fumées qui envahissent l'atmosphère. L'Italie a également offert son aide en envoyant deux avions Canadair. Quant à la Pologne, elle a envoyé un bataillon de 155 pompiers pour aider les secouristes russes.

Que font Medvedev et Poutine ?
Début août, le président russe Dmitri Medvedev a interrompu ses vacances à Sotchi, au bord de la mer Noire, pour se consacrer à la crise provoquée par les incendies. Pour aider les sinistrés, il a débloqué de son compte personnel 350.000 roubles, soit près de 9.000 euros. Quant au Premier ministre Vladimir Poutine, il multiplie les déplacements sur le terrain pour encourager les sauveteurs luttant contre les flammes.


Quels sont les risques sanitaires ?
Une "source informée" affirme que le nombre de morts a augmenté de près de 30 % en juillet à Moscou en raison de la canicule et des fumées. En effet, les habitants de la capitale suffoquent dans la fumée par 38 degrés. Et les niveaux de pollution aux microparticules - au monoxyde de carbone et aux hydrocarbures monoxyde de carbone - sont au moins 3 fois supérieurs à la normale, voire davantage selon les jours. Les autorités ont donc ouvert 123 centres antifumée, c'est-à-dire des salles climatisées, où les Moscovites peuvent venir "reprendre leur souffle"...

Les autorités russes craignent aussi une poussée d'épidémies, et notamment l'apparition du choléra. Ces dernières semaines, les cas de gastro-entérite aiguë se multiplient et la qualité de l'eau s'est détériorée dans 52 des 83 régions russes.

Faut-il craindre des retombées radioactives ?
L'éventuelle propagation des flammes à une zone irradiée par l'explosion de Tchernobyl, en 1986, est au centre des préoccupations. Si ce scénario devait se produire, des particules radioactives, notamment du césium 137, pourraient être renvoyées dans l'atmosphère. Mais, pour l'heure, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) se veut rassurant. Même réactivée, la présence de césium 137 serait, de toute façon, trop basse pour présenter un danger en matière de santé publique. Dans la mesure où ces particules peuvent atteindre la France, l'IRSN a promis d'être vigilant.

Mais d'autres inquiétudes demeurent puisque les flammes sont aux portes d'au moins trois sites nucléaires. Les autorités russes ont ainsi décrété l'état d'urgence autour du centre de retraitement de déchets nucléaires à Ozersk, dans l'Oural. Ce gigantesque complexe, lieu d'une catastrophe nucléaire en 1957, est aussi le site de stockage de très grandes quantités de déchets nucléaires. Le centre nucléaire de Sarov, dans la région de Nijni Novgorod, à 500 km à l'est de Moscou, est aussi menacé, de même que le centre de Snejinsk (Oural), qui élabore des armes nucléaires.

Pourquoi le prix du blé flambe-t-il ?
Frappée par la sécheresse et les incendies, la Russie - troisième exportateur mondial de blé - a revu à la baisse sa prévision de récolte. Et Moscou a annoncé, le 5 août, un embargo sur les exportations de céréales jusqu'à la fin de l'année 2010. Cette décision a aussitôt fait flamber les cours du blé sur les marchés internationaux. Une situation qui devrait profiter aux États-Unis et à l'Union européenne, tous deux grands producteurs de céréales. Leurs exportations pourraient combler le vide laissé par la Russie.

Source : Le Point